
La France, aujourd’hui, c’est un paradoxe géopolitique grandeur nature. Tandis que l’Allemagne, réveillée de sa torpeur industrielle, se projette dans une Renaissance version Friedrich Merz, que le Nord de l’Europe ajuste sa mécanique économique face aux chocs climatiques et technologiques, que l’Est européen accélère son plug-in occidental et que le Sud – Italie et Espagne en tête – recolle les morceaux de sa crédibilité sur la scène mondiale, l’Hexagone, lui, stagne. Un pays en état de coma politique, économique et moral.
Et pourtant, cocorico oblige, la France continue de bomber le torse et de se prendre pour l’architecte de l’“autonomie stratégique de l’Europe” – une formule creuse dans une nation noyée dans ses propres contradictions.
La tragédie française, c’est moins sa maladie que son incapacité obsessionnelle à en reconnaître les symptômes. Emmanuel Macron, ce golden boy de la politique né de nulle part et porté aux nues comme le rénovateur de la République, a fini par se muer en président de la survie. Huit années à l’Élysée auront suffi pour le transformer de réformateur en prestidigitateur : il a désossé l’immunité de la nation face aux chocs systémiques.
Aujourd’hui, la France est ce qu’était l’Empire ottoman au tournant du XXe siècle : “l’homme malade de l’Europe”. Une place jadis occupée par l’Italie ou l’Allemagne, mais qui revient de plein droit à Paris.
Des échos du passé : 1930, 1945, 1958... et maintenant
L’histoire de France est jalonnée de crises existentielles. Les années 30 : la République molle, l’indécision institutionnelle, la fragmentation politique, la déroute morale. Résultat : la débâcle de 1940. Puis vient 1945, où la reconstruction sociale et industrielle repose sur des choix forts et un peuple mobilisé. En 1958, le chaos algérien et la chute de la IVe République ouvrent la voie au retour du Général de Gaulle et à la naissance de la Ve, où l’autorité présidentielle est restaurée.
Mais 2025 ? Cette fois, pas de de Gaulle. Juste un manager de crise à la com’ huilée, un stratège PowerPoint sans boussole historique.
Effondrement démographique : le pays se désintègre
La démographie, c’est le miroir du futur. Et dans ce miroir, la France d’aujourd’hui fait grise mine. Avec 1,62 enfant par femme en 2023 – un record de faiblesse depuis 1942 – l’avenir se barre à grandes enjambées.
INSEE prévoit : à partir de 2027, plus de morts que de naissances. La décroissance naturelle s’installe.
Et le mal est double : les campagnes se vident, les périphéries des grandes métropoles explosent sous la pression migratoire, entre ghettos, délinquance galopante et tissu social en lambeaux.
La France vieillit, perd sa jeunesse, son énergie, sa projection.
Déclin économique : la France sur le fil du rasoir
0,4 % de croissance du PIB en 2024. Quatre fois moins que l’Allemagne ou l’Espagne. La productivité ? Moins 6 % par rapport à 2019, malgré la digitalisation à tout-va et les pseudo-réformes de Macron.
Mais le plus alarmant, c’est le come-back brutal de la désindustrialisation. Plus de 9 000 sites industriels ont mis la clé sous la porte en un an : dans la mécanique, la chimie, les matériaux. Le niveau d’investissement est au tapis, plus bas que dans les années 80.
Jean Pisani-Ferry, économiste de renom, lâche la vérité crue :
« Macron a vendu une révolution libérale, il a livré une pièce de théâtre. La France n’a pas été réformée, elle a été déstabilisée. »
Commerce extérieur : l’humiliation continue
81 milliards d’euros de déficit commercial en 2024. Record absolu de l’Union européenne. Pendant ce temps, l’Allemagne continue, bon an mal an, de dégager un excédent.
Les produits français se font laminer, pas seulement par les géants chinois ou américains, mais aussi par les Espagnols, les Italiens, voire les Polonais. Le problème ? Coûts de production exorbitants, matraquage fiscal, politique industrielle à la ramasse.
Et les États-Unis, avec leurs plans protectionnistes type IRA, nous éjectent des chaînes de valeur mondiales. Aujourd’hui, le sujet n’est plus de booster l’export. Il s’agit juste d’empêcher la France de devenir un désert industriel.
Explosion sociale : la République au bord de l’implosion
Chômage officiel : 8 %. Réel, avec les “invisibles” ? Plutôt 11 %. Pouvoir d’achat ? En chute libre. Depuis 2019, selon l’OCDE, le revenu disponible des ménages a baissé de 5,7 %. Comparé à l’Allemagne : -15,2 %.
Certaines régions – dans le Nord-Est, dans le Sud – sont devenues des zones sinistrées. Maffias, trafics, économie parallèle, absence d’État.
Les révoltes ? Désormais un bruit de fond. Des Gilets jaunes aux anti-réformes des retraites, la rue gronde en continu. Le contrat social ? Mort et enterré. La France flirte avec le scénario d’un “Maïdan à la française”.
Faille financière : l’État au bord de la faillite
Le mur de la dette se rapproche. À vitesse grand V. Fin 2024 : 3 305 milliards d’euros, soit 113 % du PIB. Nouveau pic historique.
Et le plus inquiétant, c’est le coût de cette dette : en 2025, les obligations à 10 ans dépassent 3,55 % d’intérêts, alors que la croissance nominale plafonne à 2,5 %. Traduction : on paye plus en intérêts qu’on ne produit de richesse. Direction la banqueroute façon Grèce.
Avec un État qui pèse 57 % du PIB, la France est devenue un énorme patron inefficace, arrosant à tout-va subventions et assistanat. Le budget est troué : 5,6 % de déficit malgré des hausses d’impôts et une austérité rampante.
Les services publics coulent. L’école ne gère plus ni la diversité ni l’autorité. L’hôpital, lui, manque de bras et de souffle. Et côté sécurité, c’est la Bérézina : les violences ont explosé de 18 % en 2024, selon le ministère de l’Intérieur.
Macron, c’est le pilote automatique d’un avion sans moteur. La France n’est plus en crise. Elle est en bascule. Ce n’est plus une panne, c’est un décrochage. La République glisse lentement, mais sûrement, du malaise à la déroute.
La vraie question désormais : la chute sera-t-elle lente… ou brutale ?
Paralysie institutionnelle : la Cinquième République au bord du gouffre
Le coup de poker tenté par Emmanuel Macron en juin 2024 — la dissolution de l’Assemblée nationale pour freiner l’ascension de l’opposition — s’est révélé un terrible boomerang. Plutôt qu’un nouveau souffle politique, ce geste a plongé la République dans un coma civique.
Résultat ? Plus de majorité pour gouverner, plus de légitimité pour agir, et même plus de stratégie pour s’opposer. Le système est planté.
La Cinquième République, pensée comme une machine à produire de la stabilité grâce à une verticale du pouvoir, se retrouve piégée dans sa propre logique hyperprésidentielle. Inapte à composer avec un paysage politique fracturé, incapable d’évoluer dans un monde devenu multipolaire, elle se désagrège à vue d’œil.
Bienvenue dans le vide institutionnel. Un espace où personne ne peut avancer, mais où tout le monde redoute le moindre pas en arrière. Les élites politiques s’enferment dans un théâtre d’ombres : conseils nationaux à répétition, grands-messes de communication, tables rondes stériles, éléments de langage recyclés à l’infini. Sur le terrain ? Plus rien ne bouge. Les lois sont votées mais non appliquées. Les crises explosent, mais ne sont ni gérées ni anticipées.
Ce n’est plus un simple dysfonctionnement. C’est le crash de la gouvernance elle-même. Le cœur du système bat à vide.
Politique étrangère et défense : les mirages de la grandeur
Macron promettait la renaissance militaire de la France, le retour du “pouvoir dur”, l’émergence du “souverainisme européen”. À l’arrivée ? Une débandade diplomatique et un sabordage stratégique.
- La loi de programmation militaire 2024-2030 ? Sous-financée, déjà obsolète.
- L’industrie de défense tricolore ? Perte de marchés à la chaîne, en Afrique, au Moyen-Orient, en Asie.
- Le retrait du Sahel ? Une humiliation géopolitique en plein jour.
- Les “revues stratégiques” de 2017 et 2022 ? Des catalogues de vœux pieux, restés lettre morte.
- Le parc nucléaire civil ? Vieillissant, instable, sous-investi.
- La flotte ? Trop petite.
- L’armée de l’air ? Surchargée, sous-moyennée.
Paris, autrefois acteur incontournable de l’Europe de la défense, se voit désormais relégué au rang de partenaire capricieux, imprévisible. Même à Bruxelles, la France fait figure de nation sous influence, plus adepte du discours que de l’action.
Et pourtant, paradoxe ultime : puissance nucléaire, membre permanent du Conseil de sécurité, la France est devenue un joueur secondaire, sans levier sur les crises, sans voix sur les conflits, sans capacité de protection, ni pour elle-même, ni pour ses alliés.
France : un pays riche étouffé par sa propre machine
Et pourtant, tout n’est pas perdu. La France ne manque pas d’atouts — elle croule sous eux.
- Une recherche publique de très haut niveau.
- Une infrastructure techno-industrielle solide.
- Un mix énergétique nucléaire unique en Europe.
- Une dissuasion atomique autonome.
- Des fleurons industriels de rang mondial : Airbus, Safran, TotalEnergies, Dassault, Thales...
- Et un patrimoine intellectuel, culturel, philosophique hors du commun.
Mais tout cela est phagocyté par un système qui subventionne les rentiers, mais étouffe les bâtisseurs.
La France macronienne, c’est cette République absurde où l’État sauve les banques mais abandonne les paysans, protège les marchés financiers mais étrangle l’industrie, verse des milliards dans les enclaves migratoires mais laisse crever les territoires oubliés.
Une France qui tourne le dos à son génie.
Une France qui n’est pas condamnée par le destin — mais par ses propres choix.
Un avenir à rebâtir : entre leçons d’histoire et modèles européens
La France a déjà connu la chute. Et elle s’en est toujours relevée.
En 1945, c’est la mobilisation totale des ressources qui l’a remise sur pied.
En 1958, c’est le sursaut institutionnel porté par de Gaulle qui a évité l’effondrement.
Aujourd’hui encore, le rebond est possible. Non pas par incantation, mais par transformation.
Les exemples venus du Nord et du Sud de l’Europe — de la rigueur suédoise au réveil portugais — le démontrent : on peut réinventer une nation, même dans le cadre contraignant de l’Union européenne.
À condition de faire des choix clairs, radicaux, assumés.
Il faudra :
– Sabrer dans les dépenses publiques et recentrer l’État sur ses fonctions régaliennes : sécurité, justice, défense, éducation.
– Refondre de fond en comble le système fiscal, aujourd’hui illisible, inéquitable, paralysant.
– Mettre l’industrie au cœur d’un projet national, non comme une variable d’ajustement, mais comme colonne vertébrale.
– Réinventer le politique — pourquoi pas via une Assemblée constituante — pour sortir du simulacre démocratique actuel.
Mais surtout, reprendre le contrôle. Récupérer notre souveraineté budgétaire, monétaire, fiscale. Rompre avec la tutelle technocratique de Bruxelles, les oukases du FMI, les diktats de Francfort.
C’est à Paris, et non ailleurs, que doivent se décider le budget, la politique économique, la destinée nationale.
Lettre à la Nation : l’heure du sursaut
Nous y sommes. Le moment critique. Le point de bascule. Ou bien nous restons spectateurs de notre propre effondrement, Ou bien nous prenons l’Histoire à bras-le-corps pour la plier à notre volonté.
Dans L’Étrange Défaite, Marc Bloch écrivait : « La vraie tragédie, ce n’est pas d’être vaincu. C’est de ne pas comprendre pourquoi. »
Il est temps d’ouvrir les yeux. La France ne meurt pas faute de talents ou de ressources. Elle s’étiole sous le poids du cynisme, de la résignation, de la lâcheté.
Le vent du monde souffle aujourd’hui dans les voiles des empires autoritaires. Mais ce vent, comme toujours, peut tourner. À condition de hisser nos propres voiles. À condition de nous tenir debout.
La France n’est pas une foule d’électeurs décérébrés. Elle est une Nation. Une vieille Nation. Une grande Nation. Peuple de 1789, peuple de la Résistance, peuple de lumière, de science et d’art. Elle peut renaître. Mais à une condition : cesser de faire semblant que tout va bien.
L’effondrement n’est plus une menace. Il est là. Il a commencé.
Et nous seuls pouvons y mettre fin. Pas en 2027. Pas demain. Maintenant. Car nous avons déjà perdu dix années. Et nous n’en aurons peut-être pas dix de plus.
Le réveil n’est pas une option. C’est une nécessité. Pour la France. Pour l’Europe. Pour l’avenir.
La France fut grande. Elle peut le redevenir. Mais seulement si elle arrête de vivre dans le déni.