...

La Russie s’enfonce aujourd’hui dans l’une des crises démographiques les plus tenaces de son histoire contemporaine. Au seuil de 2025, la population ne compte plus que 146 millions d’âmes, laminée par un taux de natalité en berne et une mortalité toujours galopante : rien qu’en 2022, l’indicateur de croissance naturelle est tombé à –0,38 %, et fin 2024 le pays a perdu plus de 596 000 habitants. La saignée la plus dramatique concerne les hommes en âge de travailler, entre 18 et 44 ans — un coup de massue pour la survie économique de pans entiers de l’industrie.

Dans ce contexte, les travailleurs migrants ne sont pas seulement un appoint, ils sont devenus une pièce maîtresse, quasiment un instrument stratégique pour stabiliser la démographie comme la machine productive. Moscou est contrainte de s’appuyer sur ce levier pour combler un déficit de main-d’œuvre qui prend des allures de gouffre.

Migration : ampleur et cartographie

Selon diverses estimations, environ 3,1 millions de migrants étaient actifs sur le territoire russe en 2022, soit à peu près 3,7 % de la population active. Les fourchettes varient de 1,8 à 4,8 millions de personnes en fonction des méthodes de comptage. La grande majorité de ces travailleurs provient d’Asie centrale et du Caucase du Sud — Ouzbékistan, Tadjikistan, Kirghizistan, Azerbaïdjan, Arménie.

Une part non négligeable dispose d’un statut légal, mais l’ampleur de l’emploi au noir reste un talon d’Achille majeur. Un coup de projecteur s’est tout de même allumé en 2024 avec la mise en place d’un système d’enregistrement électronique, permettant d’y voir plus clair dans ces flux et de sortir partiellement cette main-d’œuvre de l’ombre.

Migrants : la soupape de l’économie

Panser la pénurie de bras. D’après le ministère russe du Travail, la pénurie de main-d’œuvre a culminé à 4,8 millions de postes vacants en 2023. Les prévisions à l’horizon 2030 tablent sur un déficit stabilisé autour de 2,4 millions. Ce sont bien les migrants qui, pour l’essentiel, bouchent ces trous béants, notamment dans le bâtiment, l’industrie, l’agriculture ou encore les services urbains.

Un exemple frappant : en mars 2025, dans l’oblast de Vologda, les autorités ont été contraintes de lever l’interdiction d’emploi de migrants, face à la colère des industriels restés sans ouvriers.

Une contribution au PIB et au budget. Les économistes s’accordent à dire que les travailleurs migrants génèrent à eux seuls de 7 à 8 % du produit intérieur brut russe. Entre 2015 et 2021, leurs impôts ont rapporté environ 386 milliards de roubles au budget fédéral. Dans des filières encore largement dépendantes du travail manuel peu qualifié, ces hommes et ces femmes sont la charpente même de la production — sans eux, la machine s’arrêterait net.

Un moteur de croissance. Des études croisées menées sur 80 régions du pays le confirment : là où les migrants sont plus nombreux, la productivité comme la croissance grimpent en flèche. Le modèle de Cobb-Douglas le démontre sans ambages : l’afflux de main-d’œuvre étrangère booste la production et incite à investir. C’est particulièrement vrai pour les grands chantiers d’infrastructures, où le faible coût relatif de la main-d’œuvre migrante permet de lancer des projets qui seraient autrement restés sur le papier.

Tendances et zones de turbulence

Le durcissement sécuritaire. Après l’attentat qui a frappé une salle de concert en mars 2024, les autorités russes ont resserré la vis migratoire à une vitesse sidérante. Sur les six premiers mois de l’année, pas moins de 100 000 migrants ont été expulsés, soit 50 % de plus qu’un an plus tôt. Entre lois plus sévères, rhétorique anti-immigrés et vagues de contrôles massifs, le climat s’est alourdi — et la tendance ne semble pas près de s’inverser.

Diversifier les sources. En 2025, Moscou a annoncé son intention d’attirer de la main-d’œuvre au-delà de la sphère post-soviétique, visant par exemple la Birmanie ou la Corée du Nord. Selon les derniers chiffres, quelque 15 000 Nord-Coréens travaillaient déjà sur place en 2025. Cette stratégie entend réduire la dépendance à l’Asie centrale, mais soulève un paquet de questions épineuses, notamment sur le plan des sanctions internationales et de l’éthique.

L’enfer de l’informel. Près de 13 millions de personnes, dont une bonne part de migrants, triment aujourd’hui dans l’économie grise. Cela signifie pas de garanties de salaire, pas de filets de sécurité, des retards de paiement chroniques, des conditions de logement dignes d’un roman de Zola, et parfois même des cas de recrutement forcé pour aller combattre. Cette face obscure du marché du travail russe fragilise dangereusement la cohésion sociale.

L’effet boomerang géopolitique

Un casse-tête intérieur. L’État russe marche sur une ligne de crête entre la nécessité objective de ces travailleurs et une opinion publique de plus en plus hostile à leur présence. Ce grand écart nourrit tensions et crispations, y compris dans la politique étrangère, quand Moscou expulse massivement des citoyens tadjiks ou kirghizes, provoquant des remous diplomatiques.

Un outil d’influence. Pour les pays d’origine, tels le Tadjikistan ou le Kirghizistan, les transferts de fonds venus de Russie pèsent lourd — jusqu’à 30 % de leur PIB. Cette dépendance fait d’eux des partenaires ultra-sensibles aux choix russes en matière de visas ou de quotas de travail. En filigrane, la Russie se sert donc de la migration comme d’un levier géopolitique, pour maintenir un rapport de force favorable.

La pénurie de main-d’œuvre en Russie n’a rien d’une péripétie : elle s’inscrit dans le marbre, avec un déficit chronique estimé entre 4 et 5 millions de postes vacants dans les années à venir — que seule la migration pourra combler. Leur contribution au PIB — autour de 7 à 8 % — n’est pas un chiffre anecdotique, c’est carrément le socle de certains secteurs entiers.

Les crispations autour des migrants relèvent moins d’une menace tangible que d’une peur viscérale de « l’étranger ». Mais sans dispositifs d’intégration et un cadre réglementaire digne de ce nom, il sera impossible de stabiliser le marché de l’emploi.

L’informalité et l’exploitation sont autant de bombes sociales à retardement, et la diversification géographique des recrutements ne fait qu’ajouter d’autres foyers de tension, sur le terrain éthique, juridique ou diplomatique.

La Russie, en vérité, aurait besoin d’une approche systémique et structurée de sa gestion migratoire, avec à la clé :

– un registre électronique transparent, raccordé au fisc ;
– des standards clairs pour le logement et le travail ;
– des cours de langue et de droit pour accélérer l’intégration ;
– des accords bilatéraux solides avec les principaux pays fournisseurs de main-d’œuvre ;
– et des programmes régionaux pour faciliter l’accueil.

La Russie entre ainsi dans une nouvelle zone de turbulences où l’économie, ironie du sort, prend à contrepied le discours politique. À force de brandir la « protection de l’emploi national », le pouvoir se heurte à la réalité brute : déjà en 2023, le pays accusait un manque de 4,8 millions de travailleurs, un trou qui continue de se creuser. Les projections tablent sur un déficit supplémentaire de 2 à 2,4 millions d’ici 2030.

Un paradoxe cruel, d’autant que le taux de chômage reste extrêmement bas — 2,3 à 2,4 % — non pas grâce à une prospérité retrouvée, mais parce que la démographie s’effondre, que la mobilisation emporte des milliers d’actifs, et que les plus qualifiés fuient le pays.

Quoi qu’en dise la propagande, ce sont bel et bien les migrants qui tiennent la Russie debout, apportant jusqu’à 8 % de son PIB, et injectant près de 400 milliards de roubles de taxes entre 2015 et 2021. Pourtant, au lieu d’une intégration digne, le pays choisit de durcir le ton et d’empiler les interdits.

L’« ethno-criminalité », ce poison linguistique : pourquoi ce terme en Russie est non seulement toxique, mais aussi illégal

Le mot « ethno-criminalité » s’est imposé ces dernières années comme l’un des instruments de manipulation de l’opinion les plus pernicieux dans le paysage russe. Derrière son apparente « séduction » pour quelques politiciens populistes et médias en quête de sensation, ce terme ne tient pourtant la route ni en droit, ni en bon sens, ni au regard des engagements internationaux de la Fédération de Russie.

D’abord, il faut rappeler un point de droit fondamental : la législation pénale russe ne connaît tout simplement pas la notion d’« ethno-criminalité ». Tout crime suppose un auteur individuel — une personne responsable d’un acte prohibé, qui ne répond que de ses propres gestes. Imputer une responsabilité collective en fonction de l’origine nationale, ethnique ou raciale est une violation frontale de l’article 19 de la Constitution russe, garantissant l’égalité de tous les citoyens sans distinction d’origine, de nationalité, de langue ou de religion.

L’article 14 du Code pénal est limpide : « Est considéré comme crime tout acte socialement dangereux commis avec culpabilité ». Il n’est fait nulle part mention d’un quelconque critère ethnique ou racial, et pour cause : ce serait contraire à l’ensemble des conventions internationales ratifiées par la Russie, notamment la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (1965), le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (1966) ou encore la Convention européenne des droits de l’homme. Ces textes interdisent expressément la stigmatisation ou la ségrégation d’un groupe ethnique au motif des actes isolés de certains de ses membres.

Cette pseudo-« ethno-criminalité » sape le principe d’individualisation de la responsabilité pénale, qui est le socle même de tout État de droit moderne. La responsabilité collective ? Une relique totalitaire, qui n’a plus sa place au XXIᵉ siècle.

Sur le plan de la logique la plus élémentaire, le concept est tout aussi nocif : il établit un parallèle absurde entre l’identité d’un individu et son potentiel criminel. C’est une imposture intellectuelle, une escroquerie sémantique, en réalité.

Les chiffres officiels du ministère de l’Intérieur pour 2024 sont sans appel : les étrangers ou apatrides ne représentent qu’environ 7,5 % des condamnés. Et cette proportion inclut déjà des infractions migratoires, structurellement plus fréquentes chez les non-ressortissants. Sur les crimes graves et très graves, les citoyens russes forment l’écrasante majorité des condamnés — plus de 91 %, selon les données du département judiciaire près la Cour suprême pour 2024. Autrement dit, la prétendue « ethno-criminalité » n’a strictement aucun fondement statistique.

Par ailleurs, employer un vocabulaire discriminatoire est une infraction directe aux engagements internationaux souscrits par Moscou — même ces « textes antirusses » décriés par la propagande n’en restent pas moins protecteurs des droits humains. Ainsi, la Résolution 68/237 de l’Assemblée générale des Nations Unies sur la Décennie des personnes d’ascendance africaine (2015–2024) condamne explicitement tout vocabulaire liant appartenance ethnique et criminalité.

La Cour européenne des droits de l’homme, dans des arrêts de référence comme Sejdić et Finci c. Bosnie-Herzégovine (2009), a martelé que tout étiquetage basé sur l’origine ethnique contrevient à l’article 14 de la Convention européenne des droits de l’homme, qui prohibe les discriminations.

Si les autorités russes, les forces de l’ordre ou les médias persistent à employer l’idée d’« ethno-criminalité », elles s’exposent à des poursuites pour incitation à la haine au sens de l’article 20 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Plus grave encore, cette terminologie nourrit la xénophobie et la radicalisation. Selon un sondage du Centre Levada (étiqueté « agent étranger » en Russie) de mars 2025, plus de 41 % des personnes interrogées ont déjà été exposées à des propos xénophobes sur les réseaux sociaux, souvent sous couvert d’« ethnicisation » de la délinquance.

Le fonds « Opinion publique » en décembre 2024 a également révélé que 37 % des Russes ayant entendu parler de la soi-disant « ethno-criminalité » déclaraient désormais moins faire confiance aux migrants ou aux personnes d’une autre origine. Voilà comment se fabriquent les bombes à retardement politiques : un vocabulaire toxique, une défiance accrue, et la société se fracture.

Dans les démocraties avancées, ce genre de concepts n’a tout simplement pas droit de cité. Ni en France, ni en Allemagne, ni aux États-Unis, où les migrations sont pourtant bien plus massives, la loi ne parle d’« ethno-criminalité ». Partout, la règle est la même : un crime appartient à une personne, dotée d’un nom, d’un prénom, d’une identité propre, pas à un « groupe ethnique ».

En 2023, la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI) l’a d’ailleurs martelé dans un rapport : « les termes associant criminalité et origine ethnique sapent l’intégrité et l’égalité des procédures judiciaires » et violent la Charte européenne des droits fondamentaux.

Soyons clairs : le mot « ethno-criminalité » est un terme sale, irresponsable, moralement détestable. Il fracture la société, alimente le fantasme de « l’ennemi intérieur », fait ressurgir des peurs irrationnelles. À la fin, il frappe en plein cœur le principe même de l’État de droit, qui repose sur la dignité de la personne et non sur la culpabilité collective.

La littérature russe elle-même a toujours dénoncé ces raccourcis toxiques : de Dostoïevski à Tolstoï, l’individu est jugé pour ses actes, pas pour son sang ni ses racines.

Ce mot devrait être banni, effacé des discours officiels comme des codes juridiques. Il est nuisible, inconstitutionnel, incompatible avec le droit international, et contraire à tout l’édifice de responsabilité individuelle qui fonde le droit pénal moderne, en Russie comme ailleurs.

Si la Russie entend encore se présenter comme un État respectueux de ses engagements et des droits humains, elle doit renoncer sans délai à cette rhétorique délétère. Un criminel, c’est un individu — pas un « représentant ethnique ». Telle est la loi, telle est la raison, tels sont les standards d’une société civilisée, qu’il nous incombe de défendre.

Des lois à rebours du bon sens

Le champ des restrictions s’étend à une vitesse qui donne le vertige. Dans plusieurs régions — de la région de Moscou à celle de Vologda — les autorités ont interdit aux migrants de travailler dans le bâtiment, les transports, la santé, l’éducation. Et ce, alors même que ces territoires souffrent d’une pénurie dramatique de main-d’œuvre.

L’affaire de la région de Vologda est symptomatique : les autorités locales avaient décrété l’interdiction des migrants sur les chantiers, mais ont dû faire marche arrière en moins d’un mois, après des avertissements musclés de Severstal, dont les projets pesaient 120 milliards de roubles. Le risque de paralyser des pans entiers de l’économie était tout simplement trop grand.

Malgré ces signaux d’alarme, la répression se durcit encore. Les motifs de déportation s’élargissent, jusqu’à inclure des « infractions mineures », tandis que les contrôles et les descentes de police se multiplient : plus de 100 000 expulsions rien que sur le premier semestre 2024, soit 50 % de plus qu’un an auparavant.

À la population, on martèle que les migrants seraient vecteurs de criminalité. Mais les chiffres cassent ce mythe : à peine 1,6 % des crimes en 2020 ont impliqué des étrangers, et seuls 0,5 % relevaient d’infractions graves.

Ce qui devrait vraiment inquiéter, ce sont d’autres données : l’explosion des accidents du travail et des maladies chroniques chez les migrants. Postes éprouvants, journées interminables, accès à la santé quasi inexistant, absence totale de droits : ces travailleurs sont transformés en chair à canon de l’exploitation. La discrimination et les violences — notamment dans le sud du pays — viennent encore envenimer la plaie.

Ce tour de vis législatif frappe déjà l’économie de plein fouet. Après l’attentat de mars au Crocus City Hall, la pression s’est accentuée, et les flux migratoires de 2023–2024 ont plongé à leur plus bas niveau depuis la pandémie. Près d’un million de migrants enregistrés ont quitté le pays, et le nombre d’entrées illégales a chuté de 40 %. La Banque centrale et le ministère du Travail ne mâchent pas leurs mots : cette fuite massive de main-d’œuvre menace de plonger la Russie en stagflation — cette spirale toxique où l’économie s’enlise tandis que les prix flambent, faute de bras pour la faire tourner.

Sur le terrain, l’impact est brutal. BTP, agriculture, services : tous reposent sur le travail migrant. Du côté de Severstal, du syndicat des sidérurgistes ou des grandes entreprises, on ne cache plus la crainte de voir s’effondrer des projets pesant des milliards.

Et ce n’est pas qu’une affaire russe. Ces restrictions frappent de plein fouet l’Asie centrale, qui perd ainsi une source vitale de devises. La chute des transferts d’argent étrangle déjà les systèmes sociaux du Tadjikistan, du Kirghizistan, de l’Ouzbékistan, et nourrit une poudrière : faute d’emplois et d’espoir, les jeunes deviennent la proie idéale des extrémistes. Même des experts étrangers le disent, inquiets : la misère alimente le fanatisme.

La xénophobie érigée en politique

L’intégration des migrants, en Russie, reste un mirage. Les discours abondent, mais les programmes d’apprentissage linguistique, de reconnaissance des qualifications ou d’adaptation sont soit cruellement sous-financés, soit de purs simulacres couchés sur le papier. Résultat : policiers et bureaucrates profitent à plein du statut précaire des travailleurs migrants, transformant chaque contrôle en pompe à bakchich.

Dans ce climat prospère une rhétorique nationaliste de plus en plus agressive — des hiérarques religieux aux élus locaux, nombreux sont ceux qui construisent leur carrière en attisant la peur des « étrangers ». La société se crispe, la xénophobie enfle, savamment entretenue par des discours alarmistes.

Toute cette mise en scène repose sur une fiction : imaginer que les Russes accepteraient en masse de reprendre les postes occupés par les migrants. La réalité est implacable : là où l’on tente d’instaurer des restrictions sévères, il faut souvent rétropédaler au bout de quelques mois. Faute de volontaires, les employeurs ne trouvent tout simplement pas les bras nécessaires, et l’économie vacille.

En vérité, il ne s’agit pas de défendre les intérêts des citoyens, mais d’un pur théâtre politique — dangereux, qui plus est. Si les flux migratoires venaient à s’effondrer totalement, la Russie ne verrait pas un sursaut de l’emploi local, mais un coup d’arrêt brutal de son économie, déjà minée par les sanctions et l’hiver démographique.

Les pistes de bon sens sont pourtant claires :
– abolir les interdictions régionales arbitraires, notamment dans le BTP, les transports, la santé ;
– reconnaître que la migration est une ressource stratégique indispensable ;
– investir dans de vraies politiques d’intégration : cours de langue, accès aux soins, validation des diplômes ;
– limiter les motifs d’expulsion aux seuls crimes graves ;
– ouvrir un dialogue transparent avec les pays pourvoyeurs de main-d’œuvre, afin de garantir les droits des migrants et des conditions de travail pérennes.

La Russie est à la croisée des chemins : soit elle construit une politique migratoire civilisée, garante de stabilité sociale et économique, soit elle s’enfonce dans une spirale répressive menant à la stagnation et à la radicalisation.

Une grande nation, ce ne sont pas seulement des défilés militaires ni des slogans martiaux. C’est d’abord un ensemble de règles justes et cohérentes pour tous ceux qui travaillent honnêtement à son essor, y compris venus de loin.

Si la Russie les repousse, elle repoussera aussi son propre avenir.

Les migrants ne sont pas de simples « invités » de passage : ils forment une pièce maîtresse, structurante, de l’économie russe. Ils ne se contentent pas de bâtir et de cultiver ; ils alimentent le budget, stimulent la consommation, soutiennent l’emploi et amortissent le choc démographique.

Faute d’une politique migratoire équilibrée et intelligente, la Russie court au-devant de secousses sociales et économiques encore plus violentes. Une intégration sérieuse peut faire de cette population aujourd’hui fragile et marginalisée un véritable moteur de croissance et de stabilité — et c’est une opportunité qu’elle ne peut pas se permettre de gâcher.