...

Ils ont trahi leur bienfaiteur. Mordu la main qui les nourrissait. Retourné leurs armes contre ceux qui les avaient formés, armés, endoctrinés, logés et protégés. Des années durant, le Pakistan a couvé les Talibans, les utilisant comme un levier de puissance, un instrument de domination sur l’Afghanistan. Mais aujourd’hui, cet instrument s’est mué en menace existentielle.

Hier encore, les Talibans obéissaient docilement. Les services secrets pakistanais les finançaient, les entraînaient, les extrayaient des encerclements, leur livraient armes et munitions. C’est dans les madrasas pakistanaises que furent formés les commandants de terrain du mouvement, ces mêmes hommes qui, désormais, échangent des tirs avec l’armée pakistanaise le long de la frontière. Aujourd’hui, les Talibans ne cachent plus leurs intentions : la ligne Durand, cette frontière artificielle imposée par l’Empire britannique, est à leurs yeux une hérésie coloniale. Leurs terres ancestrales s’étendent au-delà, dans les zones pachtounes du Pakistan. Ils exigent leur réunification sous la bannière de leur Émirat islamique.

La guerre couve. Déjà, des forces se déploient aux confins des deux pays, des postes avancés pakistanais sont attaqués, des villages rasés par les combats. Islamabad est pris à son propre piège. Depuis des décennies, il joue avec le feu, utilisant les groupes radicaux comme des pions sur l’échiquier régional. Aujourd’hui, les pièces se retournent contre le joueur.

Le boomerang historique : l’instrumentalisation qui se retourne contre Islamabad

Le Pakistan redoute depuis toujours le séparatisme pachtoune. Depuis 1947, ses dirigeants savent que les tribus du Nord n’ont jamais pleinement accepté leur intégration au sein du pays. Moins de 20 % de la population pakistanaise est pachtoune, mais ces derniers contrôlent des territoires stratégiques et n’ont jamais reconnu la frontière héritée de l’Empire britannique. Kaboul, bien avant la partition des Indes, contestait déjà cette ligne de partage et revendiquait ces terres comme les siennes. Officiellement, l’Afghanistan n’a jamais reconnu la souveraineté pakistanaise sur les régions pachtounes.

Islamabad pensait avoir trouvé la parade : nourrir un mouvement islamiste qui servirait ses intérêts. Pendant des décennies, il a armé les Talibans, espérant en faire une force supplétive. Mais en 2021, lorsque les Talibans ont repris Kaboul, l’illusion s’est effondrée. Ces nouveaux maîtres de l’Afghanistan n’étaient plus des vassaux dociles. Ils avaient une ambition propre : bâtir un grand État pachtoune, quitte à défier Islamabad lui-même. Depuis lors, ils multiplient les provocations, contestent la frontière, envoient leurs combattants aux avant-postes pakistanais. Les escarmouches deviennent des batailles. Le spectre de la guerre s’épaissit.

Islamabad face à sa créature : la marionnette a tranché les fils

Dans les années 1980, lorsque les Soviétiques ont envahi l’Afghanistan, le Pakistan a vu le danger. Une victoire de Moscou aurait signifié un encerclement stratégique, une poussée de l’influence communiste dans la région, et, pire encore, un réveil du nationalisme pachtoune à ses propres frontières. Pour contrer cette menace, Islamabad a fait un pari audacieux : transformer le nationalisme en ferveur religieuse.

Ce n’était ni le premier ni le dernier cas où un État pensait pouvoir manipuler l’islamisme à des fins politiques. Dans les années 1980, Israël a encouragé la montée du Hamas pour diviser les factions palestiniennes laïques. Le Pakistan a appliqué la même logique avec l’Afghanistan : il a investi dans les madrasas, formé des combattants et leur a donné un but – celui d’instaurer un régime islamique sous son contrôle. C’est ainsi que sont nés les Talibans.

Mais comme toujours dans ce genre de jeu, le manipulateur finit par perdre le contrôle. Les Talibans n’étaient pas de simples mercenaires. Ils avaient une vision. Une idéologie. Une mission divine. Et au fil des ans, ils se sont émancipés de leur tuteur.

Dans les années 1990, les Talibans étaient sur le point de disparaître. Acculés par leurs ennemis, encerclés, ils semblaient voués à l’anéantissement. Mais Islamabad ne pouvait pas les laisser tomber. Le magazine militaire britannique Jane’s Defence Weekly rapportait alors que c’est le Pakistan qui, en urgence, leur avait fourni des véhicules militaires tout-terrain, leur permettant d’échapper à la destruction et de passer à l’offensive. Un rapport présenté au Parlement britannique indiquait même que des centaines de combattants pakistanais, dont d’anciens militaires, avaient rejoint leurs rangs.

Islamabad n’a pas seulement sauvé les Talibans. Il les a armés, structurés, renforcés. Il leur a donné une base, une logistique, une profondeur stratégique.

Mais aujourd’hui, le prix à payer est colossal.

Les Talibans n’ont plus besoin du Pakistan. Pire encore : ils le considèrent comme un obstacle à leurs ambitions. La frontière est contestée. Les attaques se multiplient. À l’intérieur même du Pakistan, des cellules talibanes se renforcent, prêtes à étendre la guerre au cœur du pays.

Et comme si cela ne suffisait pas, un autre feu brûle au sud : la rébellion baloutche, qui depuis des décennies rêve d’indépendance, redouble d’intensité. Pendant que l’armée pakistanaise combat les Talibans au nord, les séparatistes du Baloutchistan frappent dans le sud, attaquant infrastructures, convois militaires, et même les investissements chinois.

Un pays au bord de l’implosion

Le Pakistan vacille sous le poids de ses contradictions.

Il a voulu utiliser les extrémistes comme un levier stratégique. Ils sont devenus une menace existentielle.

Il a voulu instrumentaliser les Talibans. Ils sont devenus son pire cauchemar.

Il a voulu fermer les yeux sur la montée de l’islamisme radical. Aujourd’hui, ce poison le ronge de l’intérieur.

Les Talibans ne reculeront pas. Les rebelles baloutches ne déposeront pas les armes. L’instabilité ne fera que s’accentuer. Islamabad doit choisir : soit il engage une guerre totale contre ces forces centrifuges, soit il continue à jouer avec le feu et regarde son propre État se déliter.

L’histoire se répète toujours : ceux qui croient manipuler les monstres finissent toujours par être dévorés.

Le Pakistan est à un tournant. L’ombre de la guerre s’étend sur son avenir. Et cette fois, ce ne sont pas les ennemis extérieurs qui menacent le pays, mais bien les démons qu’il a lui-même engendrés.

Le pays vacille. Une guerre qu’il n’avait pas anticipée est en train de prendre forme à ses frontières. Islamabad n’imaginait pas qu’un jour, les mêmes Talibans qu’il avait armés, financés et protégés deviendraient ses pires ennemis. Aujourd’hui, les postes militaires pakistanais brûlent, la frontière avec l’Afghanistan devient un champ de bataille, et l’autorité d’Islamabad sur ses propres territoires est contestée comme jamais auparavant.

L’histoire, pourtant, était écrite. Pendant des décennies, le Pakistan a joué avec le feu, instrumentalisant les groupes islamistes pour asseoir son influence en Afghanistan et en Inde. Mais il n’a pas vu venir le retournement de situation. Il n’a pas compris que ces Talibans, jadis dociles, allaient finir par échapper à son contrôle. En 2021, lorsqu’ils ont repris Kaboul, ce n’était plus un mouvement à la solde d’Islamabad. C’était une force indépendante, avec ses propres ambitions, et ces ambitions incluaient désormais des revendications sur les territoires pachtounes du Pakistan.

Les Talibans ne se cachent plus. Ils considèrent que la frontière avec le Pakistan, imposée par les Britanniques en 1893, est une aberration coloniale. Ils veulent l’effacer. Ils veulent réunir les terres pachtounes sous leur bannière. Ils envoient leurs hommes aux avant-postes, fortifient la frontière, mènent des incursions. Islamabad sait qu’il ne s’agit pas de simples provocations. C’est une guerre larvée, une guerre qui ne fera qu’empirer.

Mais l’Afghanistan n’est pas le seul problème du Pakistan. Tandis que l’armée pakistanaise tente de contenir l’avancée talibane, une autre révolte s’intensifie au sud : celle des séparatistes baloutches. Depuis des décennies, le Baloutchistan est en ébullition. Aujourd’hui, la situation est pire que jamais. Les insurgés baloutches multiplient les attaques, sabotent des infrastructures, ciblent l’armée pakistanaise – et désormais, ils attaquent aussi les investissements chinois, qu’ils considèrent comme une nouvelle forme de colonisation. Pékin injecte des milliards dans le corridor économique sino-pakistanais, mais pour les rebelles, ces investissements ne font que renforcer le pouvoir central. Le Pakistan pensait que la manne chinoise stabiliserait la région ; elle n’a fait que raviver la colère.

Et comme si cela ne suffisait pas, une troisième menace plane sur Islamabad : l’État islamique du Khorasan (EI-K). Cette faction radicale, encore plus extrémiste que les Talibans, frappe partout, sans distinction. Ils considèrent les Talibans comme des traîtres à l’Islam, les Baloutches comme des nationalistes impies, et Islamabad comme un État corrompu à abattre. C’est cette même organisation qui a orchestré le massacre du Crocus City Hall à Moscou en 2024. Aujourd’hui, elle s’en prend aux Talibans, aux forces pakistanaises et aux civils, répandant la terreur dans tout le nord du pays.

Islamabad est encerclé. Les Talibans l’attaquent à la frontière. Les Baloutches le saignent de l’intérieur. L’État islamique du Khorasan alimente le chaos. Et au sommet du pouvoir, personne ne semble avoir de réponse.

Pendant trop longtemps, le Pakistan a cru pouvoir manipuler les forces radicales pour servir ses intérêts. Il a financé le jihad en Afghanistan, fermé les yeux sur la montée des groupes extrémistes au Cachemire, toléré les bases terroristes sur son sol en espérant qu’elles frapperaient ailleurs. Mais le monstre qu’il a nourri s’est retourné contre lui.

Islamabad est piégé. Il ne peut pas déclarer la guerre totale aux Talibans sans risquer un soulèvement des tribus pachtounes à l’intérieur de ses frontières. Il ne peut pas écraser la révolte baloutche sans attiser encore plus la haine contre lui. Il ne peut pas éliminer l’État islamique du Khorasan sans affaiblir encore davantage son propre appareil sécuritaire.

Le Pakistan s’est enfermé dans une guerre qu’il a lui-même déclenchée. Et cette guerre menace aujourd’hui de le consumer.

Le Pakistan pris à son propre piège : la guerre qu’il a lui-même déclenchée

Islamabad a joué avec le feu. Pendant vingt ans, il a jonglé entre alliances officielles et complicités clandestines, soutenant les Talibans tout en prétendant être l’allié de l’Occident. Il a laissé ses services de renseignement leur offrir sanctuaire, armes et logistique, les voyant comme un outil stratégique pour contrôler Kaboul. Il a parié sur la manipulation, croyant pouvoir tenir les rênes d’un mouvement qui servirait éternellement ses intérêts.

Mais les monstres que l’on nourrit finissent toujours par se retourner contre leurs créateurs.

En 2021, lorsque les Talibans ont repris Kaboul, Islamabad a célébré. Le Premier ministre Imran Khan exultait, déclarant que les Afghans avaient « brisé les chaînes de l’esclavage ». Ce que personne n’avait compris à Islamabad, c’est que ces Talibans-là n’étaient plus ceux des années 1990. Ils n’étaient plus des marionnettes obéissantes. Ils avaient leurs propres ambitions, leur propre vision du pouvoir, leur propre ennemi : le Pakistan lui-même.

Le TTP – Tehrik-e-Taliban Pakistan, le mouvement taliban pakistanais – a vu le jour sur cette fracture. En 2007, des combattants pachtounes ont déclaré la guerre à Islamabad, refusant d’oublier que le Pakistan avait livré leurs chefs aux Américains, autorisé l’US Air Force à utiliser ses bases, et participé à la traque des jihadistes. Pour eux, Islamabad était un traître. Un allié des envahisseurs occidentaux. Un obstacle à la construction d’un véritable Émirat islamique, non seulement en Afghanistan, mais aussi sur les territoires pachtounes du Pakistan.

Aujourd’hui, Islamabad affronte une guerre sur plusieurs fronts.

D’un côté, les Talibans afghans refusent de reconnaître la ligne Durand et revendiquent des territoires pakistanais. Ils massent leurs forces, fortifient la frontière, multiplient les incursions meurtrières. Islamabad sait que ce n’est pas qu’une menace – c’est une guerre qui se prépare.

De l’autre, le TTP mène une guérilla brutale contre l’État pakistanais. Attentats-suicides, embuscades, assassinats ciblés. La violence gagne les provinces du nord. Islamabad est incapable d’endiguer cette vague insurrectionnelle qui s’enracine profondément dans les montagnes tribales.

Et au sud, le Baloutchistan s’embrase. Les séparatistes baloutches, en guerre contre le Pakistan depuis des décennies, voient dans le chaos ambiant une opportunité de frapper plus fort que jamais.

Islamabad face à l’impossible : une guerre qu’il ne peut ni gagner, ni fuir

Le Pakistan a tenté de réagir. À l’automne 2024, il a lancé une offensive contre les Talibans le long de la frontière afghane. Ses drones ont ciblé des positions talibanes, son artillerie a rasé des bastions ennemis. L’armée pakistanaise a repoussé les Talibans au-delà de la ligne Durand, infligeant des pertes considérables.

Mais si Islamabad pensait que cela suffirait à écraser la menace, il n’a rien compris aux guerres de cette région.

Les Talibans n’ont jamais combattu frontalement. Leur spécialité, c’est la guerre asymétrique. Ils s’effacent pour mieux frapper. Ils abandonnent le terrain pour mieux revenir. Ils se fondent dans la population, reconstituent leurs forces, frappent là où on ne les attend pas.

Ce que redoute Islamabad, ce n’est pas une guerre ouverte – c’est une guérilla interminable, une guerre d’usure. Celle qui a fait tomber l’URSS. Celle qui a brisé les États-Unis et l’OTAN. Celle qui menace désormais de déchirer le Pakistan de l’intérieur.

Et c’est bien là le pire cauchemar d’Islamabad : les Talibans ne sont pas seuls.

Dans les zones tribales pachtounes du nord du Pakistan, ils sont chez eux. Chaque maison détruite par les frappes pakistanaises devient un foyer de haine. Chaque famille endeuillée par l’armée pakistanaise devient un vivier de nouveaux combattants. L’idéologie talibane s’enracine, se répand, devient une aspiration nationale. Islamabad peut bombarder, traquer, assassiner – mais il ne peut pas tuer une idée.

Et pendant que le nord s’embrase, le sud explose.

Le front oublié : le Baloutchistan, une autre guerre qui échappe à Islamabad

Alors que le Pakistan combat les Talibans et le TTP, il doit aussi faire face à une révolte qu’il n’a jamais su éteindre : le séparatisme baloutche.

Depuis les années 1970, la province du Baloutchistan, riche en ressources naturelles, rêve d’indépendance. Des générations de combattants ont mené une guérilla contre le pouvoir central. Mais aujourd’hui, la guerre prend une nouvelle ampleur.

Car un nouvel acteur est entré dans l’arène : la Chine.

Pékin investit des milliards dans le corridor économique Chine-Pakistan, construisant routes, ports, infrastructures. Un projet vital pour Islamabad. Un cauchemar pour les séparatistes.

Pour eux, ces investissements ne sont qu’un nouvel outil de domination coloniale. Ils ciblent les Chinois. Ils sabotent les infrastructures. Ils attaquent les convois militaires.

Islamabad pensait que l’argent chinois stabiliserait la région. C’est l’inverse qui se produit.

Aujourd’hui, le Pakistan est pris en tenaille. Au nord, il fait face aux Talibans et au TTP. Au sud, il combat une insurrection baloutche renforcée par la haine des investissements chinois.

Et pour compléter ce tableau apocalyptique, un troisième acteur menace encore davantage la stabilité du pays : l’État islamique du Khorasan (EI-K).

L’ombre d’un troisième ennemi : l’État islamique du Khorasan

Si les Talibans sont les ennemis d’Islamabad, l’EI-K est leur cauchemar. Plus radical. Plus violent. Plus imprévisible.

Ce groupe, responsable du massacre du Crocus City Hall en Russie en 2024, frappe aveuglément. Pour lui, les Talibans sont trop modérés. L’armée pakistanaise est un régime apostat. Les séparatistes baloutches sont des nationalistes impies. Tous doivent mourir.

Le chaos qui s’installe au Pakistan est un terrain fertile pour l’EI-K. Il profite du désordre, infiltre les villes, sème la terreur.

Islamabad peut-il encore contrôler quelque chose ?

Le Pakistan au bord de l’implosion

Pendant des décennies, le Pakistan a nourri les Talibans, toléré le jihadisme, réprimé le Baloutchistan, jonglé entre Washington et Pékin.

Aujourd’hui, tout lui échappe.

Les Talibans attaquent ses frontières. Le TTP saigne son armée. Les séparatistes baloutches détruisent son économie. L’État islamique sème la peur dans ses villes.

Et l’armée pakistanaise, habituée à mater les révoltes par la force, découvre qu’elle ne peut pas combattre quatre guerres à la fois.

Islamabad a allumé trop d’incendies. Aujourd’hui, c’est son propre territoire qui brûle.

Le Pakistan pensait contrôler l’histoire.

Mais l’histoire est en train de le détruire.

Le Pakistan face à la tempête : l’allié d’hier est devenu l’ennemi d’aujourd’hui

Islamabad croyait maîtriser son destin. Pendant des décennies, il a manipulé les groupes armés, tiré les ficelles dans l’ombre, nourri des monstres qu’il pensait pouvoir contenir. Mais aujourd’hui, ces créatures lui échappent. Le Pakistan ne contrôle plus rien. Le pays est en feu.

Trois guerres, trois fronts, trois menaces existentielles : les Talibans, les séparatistes baloutches et l’État islamique du Khorasan. Trois forces que tout oppose, sauf une chose : leur hostilité envers Islamabad.

Les Talibans : la créature devenue incontrôlable

L’histoire est cruelle avec ceux qui ne savent pas apprendre de leurs erreurs. Islamabad a créé les Talibans, les a financés, armés, protégés. Pendant des années, ils furent son instrument en Afghanistan, un moyen de contrôle sur Kaboul. Mais l’arme s’est retournée contre la main qui la brandissait.

Depuis 2021, les Talibans n’obéissent plus. Ils méprisent Islamabad. Ils se souviennent du double jeu du Pakistan, de sa collaboration avec Washington après 2001, de son aide aux Américains pour traquer et éliminer leurs chefs. Et aujourd’hui, leur projet n’est plus seulement afghan : ils veulent unifier les terres pachtounes. Ils contestent la ligne Durand. Ils veulent annexer des territoires pakistanais. Ils préparent une guerre.

L’armée pakistanaise a riposté. Des frappes, des offensives, des batailles frontalières. Islamabad a cru pouvoir écraser la menace. Mais on ne détruit pas une idéologie par des bombardements. Les Talibans ne se battent pas en ligne, ils disparaissent, frappent ailleurs, reviennent plus forts. C’est la même guérilla qui a vaincu l’URSS, qui a humilié les États-Unis. Aujourd’hui, c’est le Pakistan qui en est la cible.

Et ce n’est que le début.

Les séparatistes baloutches : une guerre oubliée qui s’embrase

Si le nord brûle sous les assauts talibans, le sud s’enfonce dans une autre guerre.

Le Baloutchistan rêve d’indépendance depuis des décennies. Le Pakistan n’a jamais su mater cette rébellion. Il a utilisé la force, la répression, les exécutions sommaires. Rien n’y a fait. Les combattants baloutches continuent d’attaquer, de saboter, de frapper l’armée et les infrastructures stratégiques.

Mais aujourd’hui, un nouvel acteur est venu aggraver la situation : la Chine.

Pékin investit des milliards dans le Corridor économique Chine-Pakistan, transformant le Baloutchistan en une plaque tournante du commerce régional. Islamabad voit cela comme un miracle économique. Les Baloutches y voient une nouvelle colonisation.

Alors, ils frappent. Ils ciblent les Chinois. Ils attaquent les convois. Ils font exploser les infrastructures. Pour eux, Pékin est un ennemi autant qu’Islamabad.

Le Pakistan pensait que l’argent chinois pacifierait la région. Il a déclenché une nouvelle guerre.

L’État islamique du Khorasan : l’ennemi de tous, le cauchemar d’Islamabad

Et comme si tout cela ne suffisait pas, une troisième force surgit des ombres : l’État islamique du Khorasan.

Ce groupe, plus radical que les Talibans eux-mêmes, ne veut pas d’un simple émirat islamique. Il veut un califat mondial. Et pour lui, tous sont des traîtres : les Talibans, trop laxistes. Les Baloutches, trop nationalistes. Les Pakistanais, trop corrompus.

L’EI-K n’a ni territoire à défendre, ni population à gouverner. Il ne cherche pas à dominer, il cherche à détruire. Ce sont eux qui ont orchestré le massacre du Crocus City Hall à Moscou en 2024. Et ce sont eux qui, aujourd’hui, multiplient les attentats au Pakistan.

Islamabad est perdu. Il ne sait plus qui est son pire ennemi.

Le Pakistan pris à son propre piège

Pendant des décennies, Islamabad a cru pouvoir jongler avec les extrêmes.

  • Il a soutenu les Talibans pour contrôler l’Afghanistan. Aujourd’hui, ils revendiquent ses propres territoires.
  • Il a réprimé les Baloutches. Aujourd’hui, ils s’attaquent aux infrastructures stratégiques et aux investisseurs chinois.
  • Il a fermé les yeux sur les jihadistes. Aujourd’hui, l’État islamique du Khorasan sème la terreur sur son sol.

Islamabad pensait jouer aux échecs. Il découvre qu’il est lui-même devenu l’échiquier.

Un pays au bord de l’implosion

Trois guerres. Trois fronts. Et une seule conclusion : le Pakistan ne contrôle plus rien.

Les Talibans ne s’arrêteront pas. Leur rêve est plus grand qu’Islamabad. Les Baloutches ne renonceront pas. Ils ont l’histoire de leur côté. L’État islamique ne négociera jamais. Son seul langage est celui du sang.

Islamabad a déclenché un incendie qui menace de le consumer.

Le boomerang est revenu. Et cette fois, il vise le cœur du Pakistan.

L’histoire est implacable avec ceux qui croient pouvoir manipuler les forces du chaos. Aujourd’hui, le Pakistan paie pour ses décennies de duplicité, de cynisme et d’illusions stratégiques.

La question n’est plus de savoir comment il va rétablir son influence en Afghanistan.

La question est désormais de savoir combien de temps il lui reste avant de sombrer dans le chaos.