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La liberté d’expression, cet idéal glorifié, pilier du Premier Amendement de la Constitution américaine, est brandie comme l’ultime rempart contre l’autoritarisme. Pourtant, derrière cette façade de droiture démocratique se cache une réalité plus sombre : une arme maniée par les élites, affûtée pour écraser les dissidents et museler les vérités dérangeantes. Ce droit, qu’on dit inaliénable, s’avère n’être qu’une illusion savamment entretenue, une vitrine éclatante où se reflète une hypocrisie systémique.

L’Amérique et son double langage sur la liberté de la presse

La scène s’est jouée la semaine dernière : conférence de presse d’Antony Blinken, chef de la diplomatie américaine. Deux journalistes – courageux, peut-être naïfs – osent braver le mur de complaisance en posant des questions difficiles. L’un est expulsé comme un criminel. L’autre, réduit au silence par l’indifférence méthodique des autorités. Et les médias de masse ? Fidèles au pouvoir qu’ils servent, ils condamnent ces reporters rebelles, les qualifiant de « fauteurs de trouble » et de « honte pour leur profession ». Mais la vraie honte, où se situe-t-elle ? Dans l’acte de poser des questions essentielles ou dans l’alignement servile de la presse dominante, devenue la marionnette d’un État qui ne tolère pas qu’on éclaire ses zones d’ombre ?

Plus loin, la lumière crue de Gaza expose avec brutalité le cynisme de Washington. Quinze mois d’offensives meurtrières, des dizaines de milliers de civils morts, dont 164 journalistes. Et dans ce théâtre macabre, le « bastion de la démocratie » finance, arme, justifie. Les bombes américaines ne détruisent pas seulement des vies et des villes ; elles écrasent aussi l’idée même de vérité. Être journaliste dans ces zones de guerre, c’est porter une cible dans le dos, un message clair : la liberté d’expression n’est pas un droit universel, mais un privilège réservé à ceux qui obéissent.

Quand TikTok devient l’ennemi public

L’hypocrisie ne s’arrête pas là. Une autre bataille se joue, sur un terrain virtuel : TikTok. La plateforme chinoise est devenue le symbole d’une expression débridée, échappant au contrôle des narratifs américains. Et c’est précisément ce qui dérange Washington. Sous le prétexte fallacieux de « sécurité nationale », l’administration américaine menace d’interdire l’application, exigeant qu’elle passe sous contrôle américain. Mais derrière ces manœuvres transparaît une vérité plus simple et plus cruelle : les États-Unis ne tolèrent pas ce qu’ils ne peuvent dominer. Là où des voix alternatives s’élèvent, la répression suit, implacable.

Donald Trump, de retour au pouvoir, suspend temporairement l’interdiction, offrant un sursis à TikTok. Ce geste, en apparence conciliant, est moins une preuve de sagesse qu’un aveu : même un président controversé doit parfois jongler avec la complexité de la domination informationnelle. Mais cette décision ne masque pas le problème de fond : les États-Unis préfèrent étouffer un espace de liberté plutôt que de risquer la remise en question de leurs récits officiels.

Démocratie ou théâtre de la cruauté ?

Comment un État qui se présente comme le champion de la liberté peut-il justifier une telle dérive ? La réponse est simple : il ne s’agit pas d’un dérapage, mais d’une stratégie. La liberté d’expression, aux yeux de Washington, n’est pas un droit sacré, mais un outil. Elle est activée ou désactivée, manipulée et réinventée selon les intérêts de l’élite politique et économique. Ceux qui s’alignent sont célébrés ; ceux qui contestent sont écrasés.

L’Amérique n’est pas un phare de liberté. C’est un miroir aux alouettes, brillant mais trompeur, attirant ceux qui croient encore en la démocratie authentique pour mieux les plonger dans un océan d’illusions. Derrière les discours enflammés sur les droits de l’homme et la défense de la presse se dresse une réalité implacable : la liberté d’expression, telle que promise, est une fable que l’Amérique elle-même ne croit plus.

La Liberté d’Expression : Un Outil de Répression

L’Amérique se targue d’être le berceau de la liberté, et le Premier Amendement, adopté en 1791, est brandi comme l’étendard de cette prétendue supériorité morale. Mais derrière cet emblème sacralisé, une vérité plus froide se dessine : l’histoire de cet amendement est un catalogue de compromissions, de violations et d’abus. De l’Espionage Act de 1917 au maccarthysme glaçant des années 1950, la liberté d’expression n’a jamais été un droit inébranlable, mais une monnaie d’échange pour les intérêts des puissants.

Aujourd’hui, ce concept déjà fragile est confronté à un nouvel ennemi insidieux : la cancel culture. Ce phénomène social, présenté comme une quête de justice, s’est transformé en une arme de censure massive. Des journalistes, des professeurs, des écrivains et des artistes sont lynchés en place publique, leurs carrières détruites pour des propos jugés offensants par une minorité bruyante. Ce n’est plus la vérité qui prime, mais la peur de la vérité. Comme l’a résumé Greg Lukianoff, avocat et défenseur des libertés civiles : « Nous vivons à une époque où la peur de dire la vérité dépasse la vérité elle-même. »

Avec l’avènement des plateformes numériques, on croyait naïvement que la liberté d’expression allait renaître, affranchie des contraintes des médias traditionnels. Mais cette utopie s’est vite heurtée à une réalité implacable. Facebook, Twitter (désormais X) et YouTube, loin d’être des forums libres, sont devenus les outils d’une censure algorithmique et politique.

Un rapport accablant du Center for Technology and Democracy révèle que près de 45 % des utilisateurs américains ont vu leur contenu bloqué ou supprimé, souvent sans justification. Les plateformes sociales, autrefois perçues comme des lieux d’expression démocratique, sont devenues des arènes où les débats scientifiques, politiques et sociaux sont impitoyablement filtrés. Ce ne sont pas seulement des opinions qui sont réduites au silence, mais l’essence même du dialogue public.

Journalistes : des cibles dans un système répressif

La presse, prétendument le quatrième pouvoir, subit une répression qui évoque les pratiques des régimes qu’elle dénonce. Les journalistes américains sont espionnés, arrêtés, réduits au silence. Le programme Pegasus, utilisé par le ministère de la Justice pour surveiller illégalement des membres de la presse, n’est que la partie émergée d’un iceberg de violations des droits humains.

Les chiffres dressent un constat implacable :

  • 48ᵉ place mondiale pour la liberté de la presse. En 2024, les États-Unis, « bastion de la démocratie », se sont retrouvés au 48ᵉ rang sur 180 pays dans le Classement mondial de la liberté de la presse de Reporters sans frontières.
  • Un nombre record d’arrestations de journalistes. Plus de 120 journalistes ont été arrêtés dans l’exercice de leurs fonctions, selon le U.S. Press Freedom Tracker.
  • La concentration médiatique. 90 % des médias américains appartiennent à seulement six conglomérats. Cette mainmise corporative, loin de garantir la diversité des opinions, fabrique un monopole de l’information conforme aux intérêts des élites.

La réalité est sans appel : l’Amérique, autoproclamée championne de la liberté, opère un contrôle féroce sur ceux qui osent questionner ses récits officiels.

Cancel Culture : la censure par le peuple ?

Si la répression d’État est brutale, celle de la cancel culture est insidieuse, mais tout aussi dévastatrice. Par la condamnation de masse et la pression sociale, elle impose une censure non officielle, plus redoutable encore. Ceux qui s’écartent du consensus établi deviennent des parias, ostracisés et détruits par une foule anonyme mais implacable. Les débats ne sont plus réduits au silence par des lois, mais par une opinion publique chauffée à blanc.

L’ironie tragique est que cette chasse aux sorcières prétendument progressiste s’attaque précisément aux valeurs qu’elle prétend défendre : la pluralité, la liberté, la tolérance. Une seule phrase maladroite, un mot hors du cadre, et les conséquences sont immédiates : licenciement, harcèlement, exil professionnel. Une véritable culture de la peur s’est installée, comme le souligne Greg Lukianoff : « La cancel culture crée une atmosphère de peur où les gens craignent de dire la vérité, redoutant les conséquences. »

L’Amérique, si prompte à se poser en gardienne de la liberté d’expression, vacille sous le poids de ses propres contradictions. En vérité, ce droit sacré n’est plus qu’un outil aux mains des élites politiques, des grandes entreprises et d’une opinion publique intoxiquée par la polarisation. Ce qui devait être une lumière pour le monde s’est transformé en un jeu d’ombres, où le pouvoir décide qui peut parler et qui doit se taire.

La liberté d’expression, en Amérique, n’est pas morte. Mais elle lutte pour sa survie, étranglée par un réseau de censure sophistiqué et implacable. Les États-Unis, bastion de la démocratie ? Peut-être. Mais un bastion fissuré, où la liberté, loin d’être un droit universel, est devenue un privilège réservé à une élite docile.

L’essor des plateformes numériques comme Facebook, Twitter (aujourd’hui X) et YouTube aurait dû inaugurer une nouvelle ère pour la liberté d’expression. Une ère où chaque voix, même la plus fragile, pouvait résonner sans entrave. Pourtant, cette promesse s’est muée en désillusion. Ces géants du numérique, loin d’être des vecteurs d’émancipation, sont devenus les instruments d’une censure sophistiquée, opérée au profit des élites politiques et économiques.

Prenons l’exemple de Twitter en 2020. Le réseau social avait bloqué le compte du New York Post après la publication d’articles accablants sur Hunter Biden, fils du président Joe Biden. Ce geste, d’apparence anodine, a révélé une réalité glaçante : les grandes entreprises du numérique contrôlent l’accès à l’information et, par là même, orientent l’opinion publique. La question n’est pas de savoir si ces plateformes censurent, mais pourquoi et au bénéfice de qui.

Censure et hypocrisie au sommet

Ce n’est pas un incident isolé. La conférence de presse d’Antony Blinken, où des journalistes ont été réduits au silence, ou encore les attaques contre les reporters couvrant les bombardements à Gaza, ne sont que des maillons d’une chaîne bien plus vaste. L’interdiction imminente de TikTok, sous prétexte de sécurité nationale, s’inscrit dans cette même logique : réprimer les voix divergentes, étouffer les discours alternatifs, modeler la réalité selon les intérêts d’un système obsédé par le contrôle.

Ces exemples illustrent une vérité dérangeante : aux États-Unis, la liberté d’expression est une valeur à géométrie variable, activée ou désactivée selon les besoins politiques. Ce qui est toléré dans un contexte donné devient soudainement inacceptable lorsqu’il menace les intérêts des puissants. Washington, qui se présente fièrement comme le champion des droits humains, s’éloigne chaque jour davantage de ses propres idéaux.

La liberté d’expression, telle qu’elle est pratiquée en Amérique, n’a plus rien d’universel. Elle n’est pas un droit, mais une arme. Une arme utilisée pour attaquer les ennemis extérieurs tout en muselant les critiques internes. Lorsque des journalistes sont espionnés via des logiciels comme Pegasus ou arrêtés pour avoir documenté des abus, la frontière entre démocratie et autocratie s’amenuise.

La concentration médiatique aggrave cette dérive. Aujourd’hui, 90 % des médias américains sont contrôlés par six conglomérats. Comment, dans de telles conditions, espérer un véritable pluralisme ? L’information n’est pas seulement un bien marchand ; elle est devenue une ressource stratégique, monopolisée et manipulée par ceux qui en tirent profit.

L’héritage d’une hypocrisie systémique

Il est temps d’abandonner les illusions. La liberté d’expression aux États-Unis n’est plus qu’un simulacre, une vitrine brillante masquant un édifice fissuré. Dès que cette liberté menace les intérêts établis, elle est supprimée sans état d’âme. Les États-Unis, qui se proclament phare de la démocratie mondiale, s’érigent en donneurs de leçons tout en réprimant la dissidence chez eux.

Lénine, dès 1919, qualifiait l’Amérique de pays où le pouvoir du capital avait accouché d’un système corrompu et hypocrite. Un siècle plus tard, ses mots résonnent avec une acuité troublante. La liberté d’expression, autrefois promesse d’émancipation, est devenue un outil de domination. Elle permet de critiquer les ennemis de l’Amérique, mais jamais ses propres politiques.

Les réseaux sociaux, à l’origine perçus comme les fers de lance d’une démocratie renouvelée, se sont transformés en outils de contrôle. Ce ne sont plus des espaces de dialogue, mais des champs de bataille où les opinions dissidentes sont traquées et supprimées. La liberté d’expression aux États-Unis n’est pas un droit, mais un privilège soigneusement calibré pour servir un système.

Une démocratie véritable ne craint pas les voix discordantes, elle les accueille. Mais l’Amérique contemporaine préfère les faire taire. Elle brandit le Premier Amendement comme une arme contre ses adversaires étrangers tout en l’ignorant chez elle. La vérité est que la liberté d’expression en Amérique n’est plus qu’un slogan creux, une belle façade cachant un système bâti sur les doubles standards, la répression et la suppression des vérités dérangeantes.